dimanche 5 juin 2011

Entretien avec Jean Louis BORLOO dans Le Parisien

"La bataille de cette présidentielle se jouera entre les progressistes et les conservateurs. Les conservateurs de gauche comme de droite, ceux qui pensent toujours de la même manière et au fond ne croient plus qu’on puisse améliorer le quotidien des Français. Je suis un progressiste, un optimiste convaincu que l’action publique peut améliorer les choses rapidement, dès lors que l’on a posé le bon diagnostic et rassemblé les acteurs pour élaborer ensemble les réponses aux problèmes." Jean Louis Borloo dans le Parisien - 5 juin 2011



Source : Le Parisien

Jean-Louis Borloo : «Avec Villepin, on peut réfléchir à l’avenir»






Soumis à de fortes pressions contraires — notamment de l’Elysée qui voudrait à tout prix l’empêcher de se présenter à la présidentielle —, le radical Jean-Louis Borloo vient de passer quelques jours au Québec pour prendre du champ. A son retour, il se dit toujours engagé dans la construction d’un projet présidentiel.


Vous rentrez du Québec. Y alliez-vous chercher l’inspiration pour votre candidature ?

Jean-Louis Borloo. Une campagne présidentielle se fait de façon ouverte sur le monde. Quand vous bâtissez un projet pour votre pays, il faut regarder autour de soi, comprendre comment les problèmes sont abordés ailleurs. C’est ce que j’ai fait sur le redressement des finances publiques et la prise en charge de la dépendance, deux sujets que le Québec a traités avec méthode et intelligence.

La France, sur ces sujets, vous semble ankylosée ?

Nous avons des gens parfaitement compétents, mais trop souvent isolés. Le Québec a une culture de la négociation très participative, très « grenellienne ». Il met les gens en réseau autour des problèmes et bâtit avec eux les solutions.

Sans être encore clairement candidat, vous construisez un projet présidentiel ?

Je suis bien dans cette démarche. J’avance.

Nicolas Hulot a déclenché une tempête chez les écologistes en affirmant avoir envisagé un accord avec vous. Cela vous attriste ?

La transition écologique et énergétique reste pour moi une question primordiale.J’ai de l’estime pour Nicolas Hulot et le travail que nous avons conduit dans le cadre du Grenelle de l’Environnement dans le respect des statuts et des convictions de chacun. Je suis convaincu que nous aurons d’autres occasions de débattre ensemble de manière non dogmatique mais je n’ai évidemment pas à m’immiscer dans les primaires d’EELV.

Quels seront les éléments clés de la campagne en 2012 ?

La bataille de cette présidentielle se jouera entre les progressistes et les conservateurs. Les conservateurs de gauche comme de droite, ceux qui pensent toujours de la même manière et au fond ne croient plus qu’on puisse améliorer le quotidien des Français. Je suis un progressiste, un optimiste convaincu que l’action publique peut améliorer les choses rapidement, dès lors que l’on a posé le bon diagnostic et rassemblé les acteurs pour élaborer ensemble les réponses aux problèmes.

Est-ce un discours de rupture ?

Plutôt un discours de méthode qui consiste à regarder les problèmes comme ils sont. Je reviens à mon obsession de l’éducation : 20% des enfants qui ont du mal à lire et écrire en sortant du CP, c’est inacceptable! Les parents seuls, les enseignants seuls ne peuvent pas tout régler. Il faut tout un village pour élever un enfant.

Certains doutent que vous alliez jusqu’au bout ?

C’est un cheminement long. Sur bien des sujets, on a trop fini par accepter le statu quo. On a transformé cela en querelles, en recherche perpétuelle de boucs émissaires. On cherche toujours chez l’autre la raison de nos impuissances. Je pense tout l’inverse : je me suis occupé d’une agglomération en grande difficulté, Valenciennes. Tout le monde s’est mobilisé pour en sortir.

Valenciennes, c’est votre expérience fondatrice ?

On a créé des réseaux et travaillé autour d’objectifs simples. Le problème de l’action politique est celui de la mobilisation au même moment sur des objectifs très clairs.

Ce n’est pas la méthode du gouvernement auquel vous avez appartenu depuis quatre ans ?

Ce n’est pas l’affaire d’un quinquennat. C’est une question de culture, celle de notre système à la fois centralisé et émietté. C’est comme ça depuis trente ans. Regardez sur la dépendance le nombre d’acteurs et de financements que l’on a en France. C’est un maquis. Après vingt ans d’expérience politique, je me rends compte que tout est faisable à condition d’être précis, méthodique et très républicain.

C’est-à-dire ?

Etre hors de l’esprit partisan ou en défense permanente de son pré carré.

A l’UMP que vous avez quittée, beaucoup doutent que votre voix puisse être audible ?

A partir du moment ou vous proposez un projet alternatif, il est normal que les autres n’y voient pas une bonne idée et trouvent 20000 raisons de l’empêcher. Si c’est suffisamment fort, clair, correspondant aux besoins des gens et si vous-même êtes suffisamment convaincu, c’est audible et rassembleur

Avez-vous quitté le gouvernement humilié en novembre 2010 ?

Je suis parti très tranquillement. Penser l’inverse est une totale erreur d’analyse. Après presque dix ans au gouvernement sur des sujets difficiles comme l’emploi, la cohésion sociale, le logement, le Grenelle de l’environnement, il est évident que j’ai construit une vision différente.

Nicolas Sarkozy a dit aux députés Nouveau Centre que vous serez obligé de « cogner » pendant la campagne et de renoncer à la « non-violence » que vous revendiquez ?

La non-violence, c’est une force qui vous pousse à aller au fond de vos convictions et à convaincre. Les campagnes de postures, de petites phrases, de violences vous exonèrent d’aller au fond des choses. Je ne serai pas dans les slogans. Je ne triche pas avec ces sujets.

L’ultimatum de l’UMP qui demande aux Radicaux de choisir leur camp vous inquiète-t-il ?

Si l’idée est de m’empêcher d’avancer, c’est assez enfantin et sans effet. Je préfère de loin le débat d’idées. Il viendra probablement…

D’aucun disent que vous étiez à Bercy lors de l’arbitrage en faveur de Bernard Tapie… ?

Je n’y suis resté que quatre semaines! C’est faux et surréaliste, (NDLR : de penser qu’il s’est occupé de cet arbitrage) et je conserve toute ma confiance à Christine Lagarde.

Acceptez-vous le risque d’être le Chevènement de la droite, qui peut provoquer un 21 avril à l’envers ?

Cela veut dire quoi ? Que seule l’UMP et sa partie la plus droitière auraient droit au dialogue avec les Français. Ce n’est pas raisonnable. Je pense que l’on sortira vite de cette période. Défendre devant les Français la cohésion sociale notamment, c’est aussi combattre le Front national, car le vrai risque du 21 avril est que le débat n’ait pas lieu.

Dominique de Villepin vous tend la main. Que lui répondez-vous ?
J’ai été ministre de l’Emploi dans son gouvernement. Nous avons mené cette bataille ensemble. On peut se parler, on se connaît et on s’estime. Il a une dimension internationale et son discours à l’ONU a marqué. On peut réfléchir ensemble à l’avenir du pays.

Et avec François Bayrou ?

Il est expérimenté. Sa dernière campagne date de 2007, mais aujourd’hui je ne connais pas ses objectifs.

Deux candidats au centre, est-ce inéluctable en 2012 ?

Tout le monde est légitime à dialoguer avec les Français. Il faut simplement le faire dans la clarté, dire quel type de gouvernance on aura.





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