jeudi 10 novembre 2011

Les investisseurs craignent de plus en plus de prêter à la France et pendant ce temps le "spread" Franco Allemand décolle

Source : Le Monde


Aujourd'hui les investisseurs craignent beaucoup plus de prêter à la France qu'à l'Allemagne et exigent une rémunération plus importante pour compenser ce risque.

Bien que Paris et Berlin disposent tous les deux de la meilleure note possible attribuée par les agences financières – un "triple A"– la perception des deux pays par les investisseurs est donc bien différente.


La situation de la France ressemble de plus en plus à celle de l'Italie, qui a vu ses taux atteindre des niveaux records.

LE CERCLE VICIEUX DE L'ENDETTEMENT


Dans le milieu financier, les observateurs estiment que la méfiance des marchés financiers devrait encore s'accroître à l'approche des élections présidentielles, période de promesses et donc de potentielle explosion des dépenses publiques.


L'écart grandissant entre les taux allemands et ceux des autres pays européens n'est pas nouveau, mais il touche particulièrement la France. Il s'est par ailleurs accéléré avec la crise italienne et les craintes que ce pays n'ait besoin comme la Grèce, le Portugal et l'Irlande de faire appel à une aide internationale pour payer les échéances de sa dette colossale, de 1 900 milliards d'euros.


Ce sont les banques françaises qui alimentent les suspicions des marchés. Elles sont considérées comme très exposées aux dettes souveraines italienne, grecque et espagnole. Si elles devaient faire défaut, les marchés craignent que l'Etat ne les recapitalise à partir de fonds publics et par conséquent s'endette encore un peu plus. Le serpent se mordrait la queue.






Le "spread" franco-allemand s'envole encore malgré les plans de rigueur


Parmi les indicateurs les plus scrutés par le ministère de l'économie et des finances, mais aussi par l'Elysée et Matignon, figure le "spread" franco-allemand. Cet indicateur mesure la différence entre les rendements des emprunts d'Etat français et allemands à dix ans. Le nouveau plan de rigueur annoncé lundi 7 novembre par François Fillon visait notamment à réduire ce fossé mais, au lendemain de sa présentation, on constate qu'il n'a pas atteint son but pour l'heure.


En quelques mois, le "spread" a connu une hausse spectaculaire. Et alors que les deux plans de rigueur lancés par le gouvernement depuis l'été devaient contribuer à le faire baisser, signe que la confiance dans les perspectives de l'économie française redevenait meilleure, c'est en fait le contraire qui s'est produit.

Le graphique montre l'évolution du "spread" depuis le début de l'année 2011. L'indice est en "points de base" et correspond à la différence de valeur entre les rendements d'emprunts français et allemands.

UN ÉCART DE PLUS EN PLUS GRAND


Avant la crise de 2008, l'écart entre les deux rendements était en moyenne de 10 points de base. Les responsables français disaient alors qu'il ne fallait pas passer le cap des 50 points de base (0.5 d'écart sur le graphique). Comme on peut le voir sur ce graphique, il dépasse ce cap depuis le 6 juillet, après l'avoir franchi une première fois au début de l'année 2009.


Un "spread" est un écart entre deux valeurs, l'une, jugée sûre, servant d'étalon à l'autre. Dans le cas présent, les analystes français comparent les taux d'intérêt demandés par les investisseurs pour acquérir de la dette française ou allemande. Ce taux traduit l'intérêt des investisseurs pour les titres de dette et la "prime de risque" qu'ils exigent pour en détenir.


Le "spread" est donc un indicateur de la confiance des investisseurs dans la capacité de l'Etat à rembourser ces titres de dette lorsqu'ils seront arrivés à terme. Plus il est élevé, moins "les marchés" font confiance dans la France dans sa capacité à rembourser sa dette.



L'exécutif n'est pas le seul à regarder de près cet indicateur. Il est aussi très surveillé par les agences de notation. La France bénéficie de la meilleure note de ces dernières, le triple A, qui lui permet d'emprunter à bas coût en émettant des titres sur les marchés qui trouvent facilement preneur, car ils sont jugés sûrs. Cependant, le 18 octobre, Moody's a annoncé que le Aaa de la France était placé "sous surveillance", laissant planer une menace pour la note de la dette, ce qui augmentera encore son rendement.




Pour "rassurer les marchés", selon l'expression consacrée, il est parfois nécessaire de faire des gestes, de prendre des mesures fortes. Les deux plans d'économies de François Fillon visaient en partie ce but. Au vu de l'évolution des "marchés" suite à l'annonce du second plan de rigueur, on ne peut pas dire qu'il soit atteint.Samuel Laurent et Alexandre Léchenet




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