samedi 31 juillet 2010

"Après avoir tué le FN, Sarkozy lui redonne un bol d'oxygène"

Nicolas Sarkozy a tenu, vendredi 30 juillet à Grenoble, un discours très ferme sur l'insécurité, réaffirmant sa volonté de lui faire la "guerre", avant d'égréner une série de mesures spectaculaires comme la déchéance de la nationalité pour certains criminels d'origine étrangère.
Source : L'Express

Remplacement du préfet de Grenoble, annonces sur les Roms, Sarkozy reprend en main la sécurité. Va t-il y gagner politiquement? L'analyse de Jean-Yves Camus, politologue spécialiste de l'extrême-droite.



Nicolas Sarkozy parle de "guerre contre les délinquants" après les annonces sur les Roms et le remplacement du préfet de Grenoble. Que traduit ce retour en force de la sécurité?

Cette politique sécuritaire est une succession d'effets d'annonce qui mise sur la communication et les déclarations à l'emporte-pièce. On a l'impression que ces décisions sont prises dans l'urgence, à la va-vite! Le problème, c'est que la réalité est bien différente: les résultats ne suivent pas en matière de baisse de la délinquance et de la criminalité. Et peu de moyens sont donnés aux forces de police pour mettre en oeuvre tout ce dispositif répressif.

Cette communication n'est-elle pas dangereuse pour le Président?

La situation politique est improductive, du point de vue électoral. Avec la multiplication des annonces coups de poing, l'exercice va peu à peu atteindre ses limites. Ces discours peuvent paraître disproportionnés à un moment où la population s'émeut de l'affaire Bettencourt et des soupçons de fraude fiscale. Une partie de l'électorat frontiste ralliée à Nicolas Sarkozy en 2007 considère déjà que les actes du gouvernement sont insuffisants.

Le Front national pourrait-il tirer parti de cette situation?

De la même manière qu'en 2002 la droite avait exploité le filon sécuritaire, il n'est pas impossible qu'une politique gouvernementale basée sur des effets d'annonce détourne une partie de l'électorat la plus radicale de l'UMP. La partie qui est à la charnière de la droite démocratique et du FN peut rejoindre les extrêmes.

Mais ce ralliement au Front national n'est envisageable qu'à condition que le successeur de Jean-Marie Le Pen, une fois désigné, sache exploiter la situation actuelle . Après avoir été rendu exsangue en 2007, le FN profiterait d'un appel d'air. Celui-là même qui avait "tué" le Front national prend le risque de lui redonner un bol d'oxygène.

Peut-on envisager une alliance FN-UMP?

Une alliance est exclue puisqu'elle ne servirait l'intérêt d'aucun des deux partis. La majorité présidentielle n'a pas besoin du FN. Et ce dernier n'a pas intérêt à abandonner sa posture protestataire. C'est parce que le FN n'est pas associé au pouvoir qu'il représente pour certains une alternative plausible.

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