dimanche 14 février 2010

Et si Obama faisait comme Giscard ?

Attaqué à droite et à gauche, Valéry Giscard d’Estaing a perdu les élections de 1981 alors que tout le monde le donnait gagnant. Une telle mésaventure peut-elle arriver à Barack Obama en 2012 ? Les deux situations sont différentes mais elles ont des points de rapprochement.
Valéry Giscard d’Estaing vient de la droite alors que Barack Obama vient de la gauche. Tous les deux se sont rapprochés du Centre au cours de leurs parcours politiques respectifs mais notre ancien Président de la République Française est resté plus au centre-droit alors que le Président des Etats-Unis est dans une posture réellement centriste avec quelques caractéristiques de centre-gauche néanmoins.

Pour autant, le maître-mot des deux hommes était et est le consensus. Que ce soit dans une vision «bipartisane» de Barack Obama ou dans celle de «deux Français sur trois» de Valéry Giscard d’Estaing. De même, tous deux ont franchi les lignes politiques pour faire adopter des mesures plutôt à gauche pour Giscard d’Estaing (avortement légal, majorité à dix-huit ans) ou plutôt à droite pour Obama (guerre contre le terrorisme en Afghanistan).

Dès lors, les deux hommes ont brouillé leur image comme n’ont cessé de le répéter des analystes en France dans les années soixante-dix et quatre-vingt et aux Etats-Unis cette dernière année. Une image brouillée signifie que l’on ne sait plus s’ils sont de droite ou de gauche car ils semblent n’être ni l’un, ni l’autre. Et ce prétendu brouillage a été utilisé par les adversaires des deux hommes. Les «amis» de droite de Valéry Giscard d’Estaing l’ont accusé de trahison (le «Parti de l’étranger», l’UDF, selon Jacques Chirac) et ceux de gauche font de même avec Barack Obama. Quant aux «ennemis», la gauche du Président français et la droite du Président américain, ils ont été trop contents de trouver des alliés pour mener la bataille !!

Je ne sais pas comment finira le premier mandat de Barack Obama. Mais on sait comment a fini celui de Valéry Giscard d’Estaing. Quasiment assuré d’être réélu à la fin de 1980 avec des sondages extrêmement favorables, il a été battu le 10 mai 1981 par François Mitterrand et demeure, à ce jour, le seul président de la V° République en place à avoir été défait lors d’un renouvellement de mandat. Sa défaite, il la doit essentiellement à une coalition de la droite gaulliste (le RPR) et de la gauche (les Parti socialiste et Parti communiste).

Cette alliance improbable est en train de se constituer aux Etats-Unis contre Barack Obama. Bien sûr, les électeurs de gauche ne votent pas encore contre le Président (notamment par le biais des élections de gouverneurs ou de membres du Congrès) mais ils ne votent plus pour lui, ne se déplaçant plus les jours de scrutin car estimant qu’il les a trahis. De ce fait, ils permettent aux candidats de droite du Parti républicain d’être élus.

Alors pourquoi, Valéry Giscard d’Estaing en son temps et aujourd’hui Barack Obama s’échinent-ils à vouloir ce consensus et cette redistribution des cartes politiques qui comportent plus de danger qu’autre chose pour leur carrière politique? Parce qu’ils savent qu’un pays ne peut se construire durablement qu’en présidant très largement. Ils ne sont pas stupides, ni de béats idéalistes comme on commence à accuser Obama de l’être, ils ont des convictions politiques centristes et ils ne se résolvent pas à cette guerre permanente entre des camps opposés qui, quand ils parviennent au pouvoir, sont obligés de gouverner au centre.

C’est ce qu’avait proposé François Bayrou aux Français lors des élections présidentielles en 2007. Il voulait gouverner avec l’ensemble des forces du pays en cas de victoire. Trois ans plus tard, partant à gauche alors qu’il venait de la droite, son parti, le Mouvement démocrate, se trouve dans les sondages entre 4 et 6% pour les prochaines régionales… Les Français sont perdus ou bien quoi qu’ils en disent, ils sont attachés aux deux blocs ?

Nicolas Sarkozy a essayé d’ouvrir à des personnalités de gauche son Gouvernement. Depuis 2007, la majorité présidentielle est d’ailleurs composée de différents mouvements dont deux sont de gauche. Mais, avec la constitution des listes pour les régionales et la place devant être laissée aux « partenaires » de la majorité, on commence à entendre des voix, même au sein du Gouvernement, annonçant que le mauvais score des régionales sera dû à une mauvaise ou sous représentativité de l’UMP sur les listes…
Ouvrir aux autres est donc un exercice difficile…

Depuis l’échec de Valéry Giscard d’Estaing, le monde a changé et les visions idéologiques extrêmes ont montré leur incapacité à apporter des réponses satisfaisantes au gouvernement des humains. Dès lors, ce consensus recherché par Barack Obama est une voie responsable. Mais c’est aussi un chemin difficile car il s’agit d’instaurer une manière de gouverner nouvelle. Pour cela, il faut que le Centre devienne majoritaire. En France, il ne l’est pas encore et notre mode de scrutin majoritaire à deux tours ne l’aide pas à le devenir... En tout cas, il a bien de choses à apprendre de la défaite de Valéry Giscard d’Estaing…

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