jeudi 7 avril 2011

Le Japon utilise de l'azote pour éviter une explosion à Fukushima

Le gaz permet de faire chuter le taux d'oxygène dans le réacteur et de limiter les risques d'accident

Source : Le Point

Les techniciens de la centrale nucléaire de Fukushima (nord-est du Japon) ont commencé jeudi à injecter de l'azote pour prévenir une explosion dans un réacteur endommagé et empêcher une aggravation de l'accident nucléaire le plus grave depuis Tchernobyl il y a 25 ans. Près de quatre semaines après le terrible séisme du 11 mars et surtout le tsunami géant qui a dévasté la côte Pacifique au nord-est de Tokyo, faisant plus de 27 000 morts et disparus, la crise à Fukushima Daiichi 1 est loin d'être réglée (consultez notre dossier spécial : Japon, la grande peur).

Des volutes de fumée blanche, probablement de la vapeur d'eau radioactive, continuent de s'échapper de trois des quatre réacteurs endommagés. Les barres de combustible dans le coeur du réacteur et dans les piscines de refroidissement doivent être arrosées jour et nuit à l'aide de pompes de secours en attendant que l'alimentation électrique et les circuits de refroidissement soient rétablis. Afin d'empêcher toute nouvelle explosion sur le site, Tokyo Electric Power (Tepco), opérateur et propriétaire de la centrale, a décidé d'injecter préventivement de l'azote dans le réacteur n° 1, où de l'hydrogène s'est accumulé en quantité importante.

Pas de nouvelle fuite

Les deux premières explosions survenues les 12 et 14 mars au niveau des réacteurs n° 1 et 3 avaient été provoquées par le contact de ce gaz avec l'oxygène. "Les travailleurs ont commencé à injecter de l'azote gazeux à 1 h 31. Depuis, le niveau de la pression a augmenté et ils ont confirmé que le gaz avait bien pénétré dans le réacteur", a indiqué un porte-parole de Tepco. Gaz inerte, l'azote est régulièrement utilisé dans les zones de stockage sensibles pour faire chuter le taux d'oxygène dans l'air et remplacer ainsi une partie de l'atmosphère.

Cette opération "d'inertage" devrait durer six jours pour un total de 6 000 m3 d'azote injecté, selon Tepco, qui envisage de l'appliquer également aux réacteurs n° 2 et 3 dans les prochains jours. Aucune nouvelle fuite d'eau des réacteurs dans l'océan tout proche n'a été constatée, a indiqué, jeudi, l'Agence de sûreté nucléaire, après le comblement réussi d'une brèche dans une fosse d'où s'échappait de l'eau hautement radioactive. Mais le risque de contamination de l'environnement marin n'est pas pour autant écarté, soulignent les experts.

Approvisionnement alimentaire en question

Les opérations de rejet volontaire en mer de 11 500 tonnes d'eau faiblement radioactive, selon Tepco, se poursuivaient pour la quatrième journée consécutive, en face de la centrale. L'évacuation de cette eau dans l'océan, où les radioéléments sont censés se diluer, est nécessaire afin de libérer des cuves de stockage destinées à être remplies d'eau hautement radioactive qui s'est accumulée dans les installations et les galeries techniques des réacteurs n° 2 et 3. Cette eau polluée contient notamment de l'iode 131, dont la radioactivité se réduit de moitié tous les huit jours, et surtout du césium 137, qui lui reste actif pendant des décennies.

Les produits de la mer sont la base de la nourriture japonaise et les Japonais, très exigeants sur la sûreté alimentaire, risquent de ne plus en consommer s'il y a un risque pour la santé. "Le problème le plus important est la concentration élevée de césium le long des côtes où l'eau contaminée est déversée", a expliqué Masayoshi Yamamoto, professeur de radiologie de l'université de Kanazawa. "Les petits poissons qui vivent près de la côte, comme les sardines ou les maquereaux, ainsi que les mollusques, risquent d'en absorber. Les substances radioactives pourraient également se déposer au fond de la mer où les poissons cherchent leur nourriture", a-t-il relevé.

D'ores et déjà, les restaurants de sushi s'inquiètent pour l'avenir de leur profession. "Si la situation s'aggrave, nous ne savons pas ce que nous allons devenir", a confié un propriétaire de bar à sushi de Tokyo. "Ça fait peur d'y penser. Notre chiffre d'affaires et le nombre de clients ont déjà baissé d'un tiers depuis le séisme, parce que les gens n'ont plus l'envie de faire la fête pour l'instant", a-t-il expliqué. Il n'a pas l'intention d'utiliser pour l'instant des compteurs Geiger pour tester les poissons. "Mais si la situation s'aggrave, je pense qu'il faudra qu'on y pense."


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