lundi 13 décembre 2010

Hervé Morin, le cauchemar centriste de Nicolas Sarkozy

Hervé Morin était la seule personnalité du gouvernement à avoir la certitude, bien avant tout le monde, de quitter son poste ministériel alors que le remaniement n’était encore qu’une construction de l’esprit.


Si traditionnellement, certains commentateurs politiques ont l’habitude de terminer leurs analyses par lancer de gros pavés tels que : la France a la droite la plus bête du monde et la gauche la plus anarchique, il faudrait dorénavant ajouter qu’elle dispose du Centre le plus effervescent. Nouvelle icône de ce Centre qui menace ouvertement de prendre le maquis, Hervé Morin, ancien ministre de la Défense. Hervé Morin pourra revendiquer une grande originalité. Il était la seule personnalité du gouvernement à avoir la certitude, bien avant tout le monde, de quitter son poste ministériel alors que le remaniement n’était encore qu’une construction de l’esprit. Cette certitude provenait d’un profond désaccord entre lui et Nicolas Sarkozy. Le président voulait qu’il abandonne publiquement l’idée de présenter une candidature centriste en 2012. Et Hervé Morin y tenait comme à la prunelle de ses yeux. C’est en tout cas l’impression qu’il donnait à chaque apparition. Un centriste en campagne qui ne rate aucune occasion pour marquer sa différence sur de nombreuses questions politiquement vitales comme le boulier fiscal ou le débat sur l’identité nationale. Le divorce entre Nicolas Sarkozy et Hervé Morin est d’autant plus grinçant que le président de la République l’avait utilisé pour conjurer le danger d’un autre centriste à la dent dure qu’était François Bayrou au sommet de son opposition. Hervé Morin a été installé à la tête du «Nouveau Centre» pour faire de l’ombre au MoDem. Il a été nommé ministre de la Défense pour y gagner en poids et en visibilité. Mais là où Nicolas Sarkozy s’attendait à une obéissance militaire, Hervé Morin a montré des velléités d’indépendance et une liberté de ton inhabituelle pour une créature politique sous perfusion.

La décision de le renvoyer à sa chère Normandie a été prise, surtout qu’aujourd’hui, la danger contre lequel il avait été élevé comme un épouvantail, à savoir François Bayrou, a perdu de sa superbe et de sa pertinence. Logiquement, Hervé Morin devrait retrouver l’anonymat propre aux micro-structures créées au cours de grandes manœuvres politiques et abandonnées en rase campagne pour manque d’usage. Sauf qu’Hervé Morin doit être né sous une bonne étoile. Sa disgrâce s’accompagne de deux faits majeurs qui risquent de configurer les mois qui nous séparent de la présidentielle. Le premier est la montée en puissance de Dominique de Villepin et sa prétention à jeter son dévolu sur la sensibilité centriste de l’UMP. Le second est la fracassante sortie de Jean-Louis Borloo du gouvernement. Actuellement, Jean-Louis Borloo n’est que frustration et désir de vengeance. L’idée de fédérer la famille centriste pour peser sur les choix présidentiels est la seule voie qui lui reste pour prendre sa revanche sur l’humiliation que lui a fait subir Nicolas Sarkozy sous la pression de François Fillon. Il trouvera en face de lui un autre centriste atteint dans son amour-propre, Hervé Morin qui tient absolument à faire mentir les oracles comme il l’a dit dans une interview publiée jeudi par «Libération» : «Or, à l’UMP aujourd’hui comme au RPR hier, les responsables considèrent qu’un centriste finit toujours par se coucher. C’est contre cela que je me bats, je veux des centristes debout». Hervé Morin, inoffensive créature d’hier, se déclare prêt à vendre chèrement sa peau dans un héroïsme totalement inédit dans la famille centriste. C’est dire l’ampleur du défi qui attend Nicolas Sarkozy pour rassembler de nouveau la droite.

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